Radars acoustiques : mettre le bruit en sourdine

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L’expérimentation des radars automatiques acoustiques pour mesurer le bruit des véhicules en circulation est lancée. On vous explique tout.

Lutter contre la "pollution sonore"

La loi d'orientation des mobilités dite « LOM » du 24 décembre 2019 (article 92) a prévu la possibilité d'expérimenter de contrôles automatisés fixes et mobiles des niveaux d'émissions sonores des véhicules en mouvement (voitures, deux-roues...). C'est un alinéa qui a en effet été ajouté dans l'article L.130-9 du Code de la route dédié aux contrôles automatisés. Il prévoit en substance « qu'un décret en Conseil d'État fixe la procédure pour l'expérimentation de la constatation des niveaux d'émissions sonores des véhicules par des appareils de contrôle automatique fixes et mobiles. Cette expérimentation est de deux ans. » Objectif ? Pouvoir sanctionner les nuisances sonores, dues à une conduite utilisant le moteur à de régimes excessifs ou à des véhicules trafiqués.

Le décret attendu vient d'être publié au Journal officiel après avoir notamment été soumis à une consultation préalable du public par le Ministère de la Transition écologique qui s'est achevée le 15 novembre dernier. Le texte précise les modalités de mise en œuvre de cette expérimentation. Il fixe les éléments qui permettent de constituer l'infraction, de la constater et donc de la sanctionner. Il aborde aussi les objectifs techniques et opérationnels à atteindre pour aboutir au traitement automatisé des données issues des appareils de contrôle. Et, enfin, il liste les collectivités pouvant participer à cette expérimentation. Il entre en vigueur le 5 janvier 2022.

2 ans, 7 collectivités

L'expérimentation est fixée pour une durée de 2 ans. Les appareils de contrôle automatique du niveau d'émissions sonores des véhicules en circulation peuvent être installés sur le territoire des communes de Bron, Paris, Rueil-Malmaison, Villeneuve-Le-Roi, de celles appartenant à la communauté de communes de la Haute Vallée de Chevreuse, de la métropole de Nice et de la métropole de Toulouse.

Carte radars anti bruit
Source : Ministère de la Transition écologique

Un cadre pour l'implantation des radars antibruit

Les appareils de contrôle automatique du niveau d'émissions sonores des véhicules en circulation peuvent être installés :

  • sur les voies situées à l'intérieur des agglomérations
  • ET là où la vitesse maximale autorisée des véhicules n'excède pas 50 km/h.

En revanche, ils ne peuvent pas être installés simultanément sur l'ensemble des voies sur lesquelles l'autorité locale détient le pouvoir de police de la circulation. Les voies sur lesquelles un appareil de contrôle automatique est installé et les plages horaires quotidiennes d'activation de l'appareil sont fixées par un arrêté de l'autorité locale compétente.

L'information du public

signalisation radar anti bruit
Source : Ministère de la Transition écologique

Le public est informé de l'expérimentation d'un contrôle automatisé des niveaux d'émission sonores des véhicules par des panneaux d'information.
Cette information sur site est complétée par un avis mis en ligne sur les sites internet du ministère chargé de l'environnement et sur les sites internet des collectivités concernées.



Des verbalisations, mais pas tout de suite

L'expérimentation doit accompagner le développement et l'homologation de dispositifs automatisés de mesure du niveau sonore de véhicules en circulation pour, à terme, permettre de constater et verbaliser les infractions. Elle se fera en deux temps.

Première phase

Installation sur la voie publique d'appareils non homologués de contrôle automatique du niveau d'émissions sonores des véhicules en circulation par des opérateurs désignés par les collectivités locales. Cette phase a pour but de faire les tests nécessaires sur les voies de circulation en vue d'une homologation conforme aux règles métrologie légale (décret n° 2001-387 du 3 mai 2001 relatif au contrôle des instruments de mesure). Les tests de cette phase se dérouleront en conditions réelles mais sans constatation d'infraction et donc sans verbalisation. Selon le Ministère de la Transition écologique, durant cette 1re phase, un seuil de 90 décibels sera testé. Une dérogation sera prévue pour certains types de véhicules, notamment certains véhicules anciens dont le niveau sonore est susceptible de dépasser ce seuil par construction, ou encore pour les véhicules agricoles.

Deuxième phase

Elle débutera quand les appareils de contrôle automatiques capables d'attribuer à un véhicule à moteur le bruit émis lors de son passage devant l'appareil, rempliront les conditions imposées aux instruments de mesure. Le niveau sonore au-dessus duquel l'infraction pourra être constatée sera fixé par un arrêté. Dans cette phase, les infractions pourront être constatées et verbalisées sur la base de l'article R.318-3 du Code de la route que le décret est venu enrichir. Ce même article prévoit déjà plusieurs choses en matière de bruit :

  • Les véhicules à moteur ne doivent pas émettre de bruits susceptibles de causer une gêne aux usagers de la route ou aux riverains.
  • Le moteur doit être muni d'un dispositif d'échappement silencieux en bon état de fonctionnement sans possibilité d'interruption par le conducteur.
  • L'interdiction de supprimer ou réduire l'efficacité du dispositif d'échappement silencieux.

Cet article est complété par un alinéa supplémentaire qui prévoit que « les bruits émis par les véhicules à moteur circulant sur une voie située à l'intérieur d'une agglomération et où la vitesse maximale autorisée des véhicules n'excède pas 50 km/h ne doivent pas être d'un niveau d'émissions sonores supérieur à celui fixé par arrêté du ministre chargé de l'environnement, compte tenu de leur catégorie, de leur date de première mise en circulation et des vitesses maximales autorisées sur les voies de circulation ».

Ne pas respecter cette règle exposera à une amende de 4e classe. Elle pourra faire l'objet de la procédure de l'amende forfaitaire prévue par le Code de la route (montant forfaitaire 135 euros, montant minoré 90 euros). Comme il s'agira d'un contrôle automatisé (sans interpellation physique), l'avis de contravention sera adressé au titulaire du certificat d'immatriculation qui sera redevable pécuniairement de l'amende (R.121-6 Code de la route). Les constatations faites à partir des radars acoustiques automatiques homologués feront foi jusqu'à preuve du contraire (R.130-11 Code de la route).

Les conditions du contrôle et du traitement automatisés des données à caractère personnel seront fixées par un arrêté afin de respecter les règles protectrices en la matière (loi du 6 janvier 1978 susvisée et du règlement - UE - 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données) .

Enfin, le décret est l'occasion de préciser que les règles de l'article R.318-3 ne sont pas applicables au bruit émis par les avertisseurs sonores ou « klaxon » (R.313-33 Code la route) et par les avertisseurs des véhicules prioritaires et d'intérêt général (R.432-1 et R.432-2 Code de la route).

Un suivi et un bilan

L'expérimentation sera suivie et fera l'objet d'un bilan réalisé par le ministre chargé de l'environnement. Il devra intervenir au plus tard dans les 3 mois avant la fin de l'expérimentation. Les collectivités territoriales concernées par l'expérimentation seront consultées sur l'efficacité du contrôle automatisé des niveaux d'émission sonores, notamment pour les riverains. Mais ce n'est pas tout. Le bilan comprendra aussi une évaluation :

  • de l'impact sur le comportement des usagers de la route ;
  • du caractère dissuasif de la présence des appareils de contrôle automatique ;
  • de l'acceptabilité sociale de ce contrôle ;
  • et de l'éventuelle baisse constatée des niveaux des émissions sonores.

Enfin, le ministère chargé de l'environnement devra pour cette évaluation, livrer une analyse basée sur le nombre de véhicules en dépassement des seuils d'émissions sonores et sur la graduation de leurs émissions sonores par rapport au nombre de véhicules en circulation sur le site d'expérimentation.


Références :

  • Décret n° 2022-1 du 3 janvier 2022 fixant, en application du cinquième alinéa de l'article L.130-9 du Code de la route, la procédure d'expérimentation de la constatation des niveaux d'émissions sonores des véhicules en mouvement par des appareils de contrôle automatique fixes et mobiles et modifiant le Code de la route
  • LOI n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités
  • Communication Ministère de la Transition écologique